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Restauration de mares en réseau sur le causse du Larzac : action de désempoissonnement sur la mare du Castelet – Saint-Maurice-Navacelles (34)
Porteur(s)
Conservatoire d’espaces naturels d’Occitanie – Antenne Hérault (Gignac)
Le CEN Occitanie est une association loi 1901 à but non lucratif et à gestion désintéressée pour l’intérêt général, créée en 1990, agréé par l’Etat et la Région depuis 2015, et qui contribue à la préservation de la biodiversité, d’espaces naturels et semi-naturels en Occitanie, notamment par des actions d’expertise, d’accompagnement technique, de maîtrise foncière et de gestion de sites. Son action s’exerce dans le respect de la charte du réseau national des Conservatoires d’espaces naturels.
Conservatoire d’espaces naturels d’Occitanie - Antenne Hérault
Date de réalisation
Août 2023
TerminéLieu
Saint-Maurice-Navacelles (34520)
Nombre et Nature
des mares
1
en réseau
Objectif de l’action
L’intervention avait pour objectif d’éradiquer la totalité des poissons présents dans la mare.
Description
Le Carassin doré est une espèce très rustique capable de résister à de très faibles taux d’oxygène et à des températures élevées (jusqu’à 30°C). La méthode choisie pour l’éradication de cette espèce a donc été l’assèchement total de la mare, afin de détruire également les œufs qui sont encore plus résistants que les poissons, puisqu’ils peuvent résister à des périodes d’assèchement relativement courte.
La faune et la flore inféodées aux mares méditerranéennes sont adaptées à ces assèchements estivaux, qui font partie de leurs cycles biologiques.
La période ciblée a donc été début août, en plein cœur de l’été. À cette période, la totalité des têtards sont normalement déjà métamorphosés et en phase terrestre. Il ne devrait donc normalement y avoir aucun amphibien dans la mare, excepté des Grenouilles rieuses, espèce dans le sud de la France et dites invasives sur le Causse du Larzac, affectionnant les points d’eau permanents.
Également, à cette période, le niveau d’eau de la mare est déjà potentiellement bas, et donc le volume d’eau à enlever est plus faible. Les fortes chaleurs de la saison permettent ensuite de sécher plus rapidement les vases restantes au fond de la mare et de détruire les œufs de poissons.
La remise en eau peut ensuite s’effectuer naturellement grâce aux orages d’automne. La mare peut alors être fonctionnelle pour accueillir les éventuelles pontes automnales (phénomène récurrent pour certaines espèces dans les régions où les automnes sont doux).
Déroulement de l’action (photos en annexe) :
- 1-Installation du puisard :
Un puisard (puits d’infiltration) a été installé au centre de la mare, composé de deux réhausses en béton de 40 centimètres de hauteur et de largeur, empilées les unes sur les autres légèrement en biais pour laisser entrer l’eau par des espaces d’un centimètre. Les réhausses ont été enfoncées le plus profondément possible dans la vase, et toute la vase présente à l’intérieur a été évacuée de façon à pouvoir pomper de l’eau la moins chargée possible.
- 2-Installation de la pompe :
Une pompe à essence pour eau très chargée (72m3) a été utilisée. La crépine a été placée dans le puisard, et le tuyau de refoulement, d’une distance de 50 mètres, a été déroulé dans un champ en dehors de l’impluvium de la mare.
- 3-Pêche électrique :
Trois heures après le lancement de la pompe, lorsque le niveau d’eau était compris entre 15 et 20 centimètres, une opération de pêche électrique a été réalisée avec un agent de la fédération de pêche 34, un agent de l’OFB et deux techniciens du CEN dans le but d’extraire les poissons.
Les poissons ont continué d’être pêchés à l’aide d’épuisettes tout au long de la vidange de la mare, au fur et à mesure que le niveau d’eau baissait et que la densité de poissons augmentait, facilitant la capture.
- 4-Évacuation des vases liquides :
Lorsque la majorité de "l’eau libre" fut évacuée de la mare, le puisard a cessé de fonctionner, et des techniciens du CEN se sont relayés en continu pour dégager la vase trop solide et les fruits de potamogéton qui venaient boucher la crépine. Ainsi, durant près de deux heures, des vases liquides ont pu être évacuées.
- 5-Fin du chantier/gestion des poissons :
Près de 34 kilos de poissons ont été capturés lors du chantier et ont été donnés à l’association Goupil Connexion, pour être valorisés comme ressource alimentaire dans leur hôpital pour la faune sauvage, situé sur la commune de Laroque, à 25 kilomètres du lieu de l’intervention.
Bilan et perspectives
Les objectifs du jour de réalisation de l’opération ont été atteints puisque la mare a pu être vidée complètement. La pêche électrique a fonctionné, mais elle n’était pas nécessaire pour ce genre d’opération, puisque les poissons sont très facilement attrapables dès lors que le niveau d’eau est inférieur à 10 centimètres et du fait que la mare étant très chargées en vase, elle limitait l’effet de la pêche électrique.
La quantité de vase présente était beaucoup plus importante qu’attendue. Une épaisseur de 40 à 80 centimètres de vase était présente sur une superficie d’environ 250 m². La totalité de l’eau libre a alors pu être évacuée lors du chantier. Cependant, une grande quantité d’eau était encore retenue dans les vases.
Lors du premier passage de suivi post-intervention à J+7, il a été constaté que l’eau présente dans les vases s’était résorbée vers le centre de la mare, formant à nouveau un petit point d’eau où une trentaine de poissons avaient survécu. Ces derniers ont pu être retirés à cette occasion.
Voyant que ce point d’eau persistait malgré les fortes chaleurs, une intervention a été planifiée avec l’agriculteur à J+18 pour étaler l’eau et extraire de la vase dans le but d’assécher complètement la mare plus rapidement.
J+39 => Les vases de la mare étaient totalement sèches sur au moins 10 centimètres d’épaisseur, au-delà, la vase était encore humide.
J+55 => La mare s’est remplie suite à de gros orages. L’eau est très claire, aucun poisson n’est observé. Une centaine de pontes et plusieurs milliers de têtards de Pélodyte ponctué sont observés. Quant à la flore, il n’a pas encore pu être observé de dynamique particulière au niveau des herbiers aquatiques, hormis pour Eleocharis palustris apparaissant en développement et ayant servi de support de ponte pour le Pélodyte ponctué.
L’éradication des individus adultes de Carassin doré a été une réussite, et la réponse de l’écosystème ne s’est pas faite attendre, témoignant de la bonne capacité de résilience des mares suite à la disparition des poissons (voir photos).
Améliorations envisagées :
Pour des mares très envasées comme celle-ci, il pourrait être pertinent d’utiliser des pompes plus puissantes, capables d’extraire le maximum de vase liquide. L’opération présentée ici a pu être un succès grâce à une fin d’été 2023 très sèche. Dans un scénario où des orages du 15 août auraient eu lieu, comme c’est souvent le cas dans notre région, l’opération se serait soldée par un maintien en eau et un risque de persistance des populations de poisson (une trentaine de poissons étaient encore en vie le 22 août 2023, avant l’assec total de la mare).
Une solution pour améliorer l’assèchement pourrait être de prévoir l’assèchement des mares une à deux semaines plus tôt, à partir du 15 juillet. Entamer une vidange de la mare la veille du jour du chantier de désempoissonnement pourrait aussi être une piste d’amélioration à envisager.
Afin de compenser la privation de ressources en eau pour la faune sauvage entraînée par l’assèchement de la mare, il serait intéressant d’installer des bassines enterrées ou équipées d’un système l’accès à l’eau pour toute la faune en période estivale. Dans le cas présent, l’agriculteur a mis en place des bassines juste à côté de la mare pour abreuver ses brebis, mais elles n’étaient pas accessibles pour la petite faune.